vendredi 12 février 2010

combien de doigts

Elle se tâte tellement qu'elle en a mal aux paumes. Cinq fois par jours c'est pas suffisant, faut encore vérifier que tout est là avant de dormir; les pieds, l'os des hanches, le début de gras du ventre et aussi le grain de beauté sur l'épaule gauche, celui qui était pas là il y a cinq ans, quand elle avait juste à se concentrer sur l'envie. Et puis pour le reste elle prend le miroir, mais là non plus elle est pas certaine, la faute à la fatigue, et l'étincelle, on dirait, chaque jour un peu moins présente. Merde, c'est pas fini ces conneries, on voudrait bien s'arrêter un peu, admirer le paysage, récolter les fruits, comme disait elle-sait-plus-très-bien-quelle-autre-conne, elle, qui l'avait lu dans un bouquin. Seulement c'est pas d'essayer qui change, faut encore l'avoir, ce truc, cette degeulasserie de légèreté niaise, cet merveilleux don pour l'imposture. Pas qu'elle en soit fière, mais c'est pas dans sa nature, c'est tout. Faudrait qu'elle apprenne comme le langage de signes: trois doigts pour inspirer la confiance, un doigt pour ta gueule.